Chère Europe,
En Amérique du Nord, le train est un luxe, et ne passe pas partout. On prend le bus. Au bout de quatre heures, on fait une pause. Tout le monde descend pour se prendre à manger. Le bus devient un fast food sur roues. Ça sent la pizza Domino, le sandwich Subway et le café Tim Horton. Le seul moyen d’y échapper, c’est d’avoir prévu emporté son lunch. Des fruits, des légumes, achetés au supermarché du coin, où des centaines de watts illuminent les pommes cirées et les légumes aux couleurs de dînette d’enfants. On se croirait dans une bijouterie. Ici pour manger à peu près sainement, il faut avoir les moyens. Vraiment.
Toi aussi, ma petite Europe, tu t’es mise à l’industrie agroalimentaire et aux produits chimiques. Mais les OGM ne sont pas la norme, Monsanto n’a pas semé ses graines dans chaque fruit. Dans tes supermarchés le rayon des pains de mie chimique ne fait pas dix mètres de long… du moins pas encore.
C’est là que tes hauts fonctionnaires veulent t’emmener, tu sais. C’est ce qu’ils s’apprêtent à signer avec TAFTA. Ma belle Europe, tu n’as pas compris que tu as tous les potentiels pour poser une formidable alternative à ce système qui est en train de se détraquer la planète ? Je t’ai vu lorgner le grand frère nord américain avec envie. Tu ne vois pas qu’il est en fait dans le monde d’hier, et que celui de demain, d’autres coins du monde sont en train de le construire.
C’est toi l’aînée, ne l’oublie pas. Sais-tu que tu fais encore briller les yeux des Américains ? Bien plus que ceux des migrants africains, qui viennent parce qu’ils n’ont pas le choix. Oui, tu fais plus rêver ceux qui sont dans l’opulence que ceux qui fuient la misère et la guerre.